Opération Kulan au Kazakhstan

Il y a quelques semaines, notre vétérinaire Thierry Petit s’est de nouveau rendu au Kazakhstan afin de participer à une translocation d’ânes sauvages d’Asie, également appelés kulans ou hémiones, organisée par l’Okhozooprom, une organisation dépendant du Ministère kazakhstanais de l’Ecologie. Fin 2017, T. Petit avait déjà pris part à une opération similaire au cours de laquelle une dizaine d’animaux avait été transférée en hélicoptère depuis le Parc National d’Altyn Emel situé au sud-est du Kazakhstan vers la zone protégée d’Altyn Dala au centre du pays. Puis en 2019, il avait formé une partie du personnel du zoo de la capitale Almaty à la capture et à l’anesthésie d’hémiones.

Groupe d'hémiones sauvages © T. Petit

Toutes ces actions s’inscrivent dans le cadre d’un projet global visant à restaurer et protéger les populations de grands herbivores (hémiones, chevaux de Przewalski, antilopes Saïga) au sein d’un vaste habitat désormais disponible dans les steppes centrales du Kazakhstan suite aux profonds changements occasionnés par l’effondrement de l’Union soviétique.

Autrefois, l’hémione arpentait les steppes d’Asie centrale et du Moyen-Orient, depuis les rives orientales de la Méditerranée jusqu’à la Mongolie. Mais la chasse pour sa viande, la réduction de son habitat au profit de l’agriculture et la compétition avec le bétail domestique ont décimé ses populations qui subsistent aujourd’hui sur à peine 3% de leur aire de répartition originelle.

La sous-espèce d’Asie centrale, Equus hemionus kulan, est classée en danger sur la Liste Rouge de l’UICN. Seules quelques petites populations isolées demeurent encore au Turkménistan, en Ouzbékistan et au Kazakhstan où cette sous-espèce a d’ailleurs été réintroduite à partir des années 50 après son extinction enregistrée dans les années 30. Le pays abrite aujourd’hui un peu plus de 3000 individus.

L’objectif de cette nouvelle translocation était ambitieux : capturer 60 kulans dans le Parc National d’Altyn Emel pour les transférer par voie routière vers la réserve naturelle d’Ile-Balkhash à l’aide de containers pouvant accueillir une dizaine d’hémiones et de caisses de transport individuelles chargés sur des camions.

Les captures effectuées en début de nuit sur plusieurs jours successifs ont permis de capturer à chaque fois une vingtaine de kulans. Une fois les différents groupes repérés, les animaux étaient incités à se diriger vers des entonnoirs de capture à l’aide de plusieurs véhicules.

Le groupe de kulans est dirigé vers le corral à l'aide de véhicules 4x4 © T. Petit

Ils accédaient ensuite à un grand corral puis à un autre plus petit avant de converger vers un enclos de chargement amenant au container de transport. Au petit matin, les animaux étaient triés de façon à n’amener vers la zone de chargement qu’une dizaine de kulans. Une manoeuvre délicate car ils ont tendance à s’agiter dès qu’ils sont séparés. Il fallait en outre éviter de séparer les mères de leur poulain.

Corral © T. Petit
Les hémiones convergent vers l'enclos de chargement © T. Petit
Chargement d'un container sur le camion © T. Petit
Les hémiones se dirigent vers le container de transport © T. Petit
Chargement d'une caisse de transport sur le camion © T. Petit

Aucune tranquillisation n’a été réalisée, seuls 3 mâles adultes ont été légèrement sédatés afin de faciliter leur mise en caisse. Le premier voyage a ainsi conduit une vingtaine de kulans vers la réserve d’Ile-Balkhash. Surveillés à l’aide de caméras placées dans les containers, les ânes sont restés calmes pendant le trajet, malgré une portion de route particulièrement compliquée sur laquelle le camion s’est ensablé à 5 reprises. 600 km plus loin et 24h seulement après leur capture, ils ont pu être déchargés sans difficulté puis relâchés dans un enclos d’acclimatation où ils resteront plusieurs semaines avant d’être définitivement relâchés. L’opération a été renouvelée à 3 reprises, permettant l’acheminement des 60 hémiones dans la réserve !

L'équipe responsable de la translocation © Okhozooprom